Avec Lubrizol, on lubrifie même les sols,
Jeudi 26 septembre 2019, 2h40, Rouen.
Un site de stockage de Lubrizol prend feu.
Un peu plus de 5200 tonnes d’un peu plus de 500 produits chimiques en baril s’enflamment un peu, brûlent un peu et partent, un peu, en fumée.
En un peu moins de 8 h, un panache de fumées noires s’échappe de Rouen.
Un nuage noir de 6 km de large sur 22 km de long traverse les Hauts de France, la Belgique puis les Pays Bas.
« Un nuage de fumée un peu toxique mais trop ! »
20minutes.com
Le patron pétrolier, le gouvernement, les experts se veulent rassurant. Ils espèrent que les effets s’évaporent avec le nuage.
Heureusement pour les médias, un ex-président décède. En 3 secondes, les chaînes d’info et les radios changent d’éditorial.
Pendant 3 jours, hommages et recueillements sur ce président si proche des gens…
En seconde ligne, il parait que les Rouennais toussent un peu…
Mais ça commence à gueuler à Rouen, l’odeur est un révélateur de la nocivité de la pétrochimie. Cet incendie n’a été qu’un mélange et un condensé de ce qu’est rejeté par les moteurs à explosion.
En toute transparence les ministres viennent, 5 jours plus tard, sur sîte pour jurer cracher que » y’a pas de grave problème de pollution grave ».
Responsable ?
Le patron déclare qu’il est surprenant qu’un incendie se déclare à cet endroit-là à ce moment-là.Le préfet, jure que tout va bien Mme la Marquise, vu qu’il a lui-même autorisé Lubrizol à augmenter sa capacité de stockage, vu qu’il a lui-même pas vérifié les mesures de sécurités et risques environnementaux, qu’il n’a pas consulté d’expert ni d’organisme indépendant.
état de fait :
Les arroseurs anti-incendie du site de stockage n’ont pas fonctionné,
l’alarme est déclenchée à 8 h soit 5h20 min après le départ du feu,
les instruments de mesure de la qualité de l’air ne mesurent 16 types de particules dans les stations atmo sur le parcours du nuage,
le non-respect des obligations d’information à la population (sous prétexte du risque terroriste) concernant les produits stockés,
la non-volonté de mesurer les risques environnementaux sur un périmètre au delà de 20km.
la non-évacuation des 100 000 habitants de l’agglomération,
sDes conséquences négligeables :
Yeux qui piquent, gorges qui grattent, nausées qui prennent aux tripes, évanouissements qui étourdissent.
Les maladies indirectes et les cancers se déclareront dans 10 ans.
Les sols pollués, les eaux souillées, les oiseaux, insectes et autres animaux morts étouffés, intoxiqués, empoisonnés.
Les agriculteurs peuvent respirer les fumées nuageuses mais ne peuvent pas vendre les œufs, miels, fruits, légumes… Cela uniquement dans les communes dont le maire a déclaré à la préfecture « l’état de préoccupation environnementale »
Y’a cette maraîchère en bio qui cultive sa terre à 170 km de Rouen qui découvre ses blettes et sa rhubarbe suintant d’un liquide noir, ses serres recouvertes d’une pellicule noire. Elle nourrit chaque semaine plus de 80 familles en A.M.A.P. et les habitants du coin.
Que va-t-elle faire de ses poules en plein air ?
Comment va-t-elle nettoyer son sol ?
Comment va-t-elle garder son label Agriculture Biologique ?
Comment va-t-elle payer ses investissements, ses factures… ?
Conflit d’intérêt ?
Elle est allée voir le maire du village, agriculteur conventionnel, lui a montré les légumes souillés, explique la situation et lui demande de déclarer, en préfecture, l’état de catastrophe et pollution industrielle.
Il lui répond que non et que c’est pas si grave et qu’elle a juste à nettoyer sa production.
Est-ce vraiment dans l’intérêt du maire ? Lui, exploitant de 150 hectares qu’il arrose copieusement d’engrais et pesticides chimiques.
Voilà, y’a plus qu’à attendre que le vent disperse les particules, que la pluie lave les feuilles et les sols, que la terre digère toutes ces particules pétroleuses.
En Picardie, depuis des générations, on s’est habitués à voir notre terroir maltraité.
Au moyen-âge, les sangs des guerriers abreuvaient les rivières
en 14-18, ils ont pilonné et gazé les hommes et les sols, (100 ans plus tard des obus remontent encore)
en 1920, les tracteurs mécaniques ont commencé à labourer,
depuis les années 60, les usines chimiques ont recraché leur invisibles molécules,
en 1986, le nuage radioactif a pu déposer ses minuscules particules, (mon oncle a vu les feuilles de ses pommiers rosir)
et en 2019, le nuage de Lubrizol a dispersé au gré des vents ses milliards de particules pétrolières et ce meltingpot de produits chimiques.
La planète a le temps,
la biodiversité s’adapte,
les sols digèrent,
les rivières drainent,
les océans malaxent…
Mais nous, humains doit-on miser sur la chance pour pas s’empoisonner ?
Comment allons-nous nous nourrir si nos terres sont incultivables pendant plusieurs saisons ?
Est-ce la faute du préfet de Rouen ou du patron de Lubrizol ou à pas de chance :
si le crabe nous fauche plus tôt,
si les enfants naissent difformes ou diminués,
si les oiseaux et arbres meurent….
Pendant combien de temps ne serons-nous pas indemnisés ?
Est-ce que l’argent pourra rembourser leur impact sur l’environnement ?
Finalement sommes-nous aussi tous : complices, coupables et/ou victimes ?
écrit par R.A.F/C.Q.F.D.